Le CESER (Comité Economique, social et Environnementale Régional) qui rassemble, à côté du Conseil Régional d’Ile de France où siége le maire Bernard Gauducheau, les forces vives et maintenant environnementales franciliennes est souvent l’auteur de rapports et d’études très fouillés sur de nombreux sujets d’actualité ou de préoccupation francilienne. En s’interrogeant sur le devenir de la société francilienne d’ici la moitié de ce XXIème siècle, il s’est projeté pour la première fois à un horizon de plus de 40 ans, avec le rapport « Démographie, économie et lien social à l’horizon 2050 : quelles perspectives, quels leviers pour agir ».
« Sur la base de données démographiques, ce rapport aborde les différents défis auxquels sera confrontée l’Ile de France et s’efforce d’identifier les principaux leviers sur lesquels agir pour maintenir et, si possible, améliorer la compétitivité de l’Iled de France et la qualité de vie de ses habitants dans un contexte international de plus en plus complexe, tendu et mouvant. Ce n’est malheureusement pas le contexte économique et social des ces dernières années et l’actualité dramatique dont nous sommes les témoins depuis l’hiver dernier qui viendra contredire cette analyse. Il y a urgence, pour le corps social francilien au travers d’une vision d’ensemble, à agir et expérimenter dès maintenant, car les conditions de vie pour 2050 seront pré-déterminées par les actions menées d’ici 2020 » explique Jean Claude Boucherat, président du CESER.
La Section de la Prospective et de la Planification du CESER a dressé un état des lieux en constatant « qu’une page se tourne, signant la fin d'une époque. L’Ile de France est depuis plus de 60 ans la plus peuplée, la plus jeune et la plus riche des régions de France. Qu'en sera-t-il d'ici 2050, horizon symbolique du « facteur 4 » pour la préservation de la planète des émissions de gaz à effet de serre, dans un monde qui, selon l'ONU, devrait connaître une explosion démographique sans précédent de 2,5 milliards de personnes (+ 40%), conjuguée à un vieillissement universel tout particulièrement marqué dans l'Union européenne dont la population, de plus, diminuera…Dans un système économique essoufflé, c’est l'ensemble des acteurs du corps social qui se trouve face à une « ardente obligation d'agir » car « la vie sera très différente de celle d'aujourd'hui et il faut que la société s'y prépare. La coïncidence de la crise économique et de la crise écologique est l’occasion de faire émerger bon nombre de nouvelles réponses (valeurs, modes de vie). Il s’agit d’agir aujourd’hui pour éviter de devenir des suiveurs d’innovations qui se réaliseront ailleurs » expliquent ses auteurs.
Ainsi, selon cette section, la population francilienne pourrait atteindre 15 millions de personnes (+ 3 millions d'habitants) étant pour une bonne part due à l'immigration (80 000/an) – une destination prisée pour les immigrés d’Afrique subsaharienne - sachant que les immigrés sont 2 millions dans la Région Capitale (40% des immigrés métropolitains), soit 1 francilien sur 6. « 20% des franciliennes sont immigrés et contribuent à 58% à l’accroissement naturel de la Région. 4 enfants sur 10 ont au moins un parent immigré. Le sort de la deuxiéme génération est préoccupant pour l’insertion sur le marché du travail. Moins qualifiés que kes non-immigrés, mleur tauc de chômage est 2 fois plus élevé (15,2%) » indiquent ils. Le nombre des personnes âgées de plus de 75 ans doublera et le nombre des maisons de retraite devra être multiplié par 4. Même si la population francilienne demeurera relativement jeune par rapport à la France (2 ans de moins) et continuera de croître au taux de 0,7% identique à celui connu entre 1990-2008.
Par contre le taux de croissance du PIB ne devrait pas être supérieure à 1,5% (alors qu’il était de 1,9%) faisant crainte, s’il n’est pas atteint à cause de l’écart croissants entre bas et hauts revenus, à de profonds risques sociaux « Sur les 40 prochaines années, sous la triple contrainte de la crise économique, des impératifs du développement durable et de la demande effrénée des pays moteurs de la croissance mondiale, l'Ile de France devra redoubler d'efforts pour conserver sa place en tant que grande région européenne. Car nul ne sait comment la crise actuelle va évoluer…Et le désarroi qui est déjà là, pourrait encore s'aggraver : délitement du lien social et des solidarités, fragmentation croissante des parcours de vie, inquiétudes de toutes les générations y compris des jeunes » expliquent t-ils.
Ce qui ne les empêchent pas d’avoir des motifs d’espérer : « l’Ile de France a fait preuve d'une certaine résilience en traversant la crise. Elle a relativement mieux résisté que le reste du pays en termes de destruction d’emplois. Elle ne doit pas en rester là sauf à continuer à fonctionner et travailler en « mode dégradé » ce qui risquerait de provoquer son déclin et pourrait la conduire à une rupture économique et sociale. Le territoire, perdant toute attractivité, risquerait alors de devenir une « gare de triage » sans ancrage local souhaité ou possible. Les immigrés de pauvre condition continueraient sans doute à s’y rejoindre créant de nouvelles poches de pauvreté, tandis que les forces vives seraient tentées d’aller vivre et produire ailleurs ».
Et de proposer quelques pistes afin d’actionner des leviers, en expliquant que « les clés du rebond consistent d'ores et déjà dans l’encouragement et la récompense de l'innovation et de la créativité ainsi que le partage des bonnes pratiques et ce, dès l'école : Tout d’abord faire le choix stratégique d’une croissance endogène. « La valorisation du capital humain dans toutes ses dimensions est concernée au premier chef : l’éducation pour élever le niveau général des connaissances de toute la société, formation initiale et continue tout au long de la vie, polyvalence, mobilité, connaissance globale du fonctionnement de la structure, reconnaissance, adaptation du niveau de productivité ». Ensuite, ré-enchanter la vie : « le lien social sera d'autant plus vivant que le système ne sera pas déshumanisé malgré la facilité des nouvelles technologies et que les dimensions d'échanges ne seront pas toutes ramenées à des rapports marchands ». Et de parler de services à rendre et à se rendre (initiatives, proximité, entraide et solidarité), de capacité pour la Région à s’adapter et à se réguler au travers de nouvelles formes de cadre de travail (à « ré-enchanter »), de management (réflexion sur le stress) et de gouvernance. Enfin, « se donner les moyens de « faire société » suppose que soit développée, à partir d'un « connais- toi toi-même », une vision commune du savoir-penser, savoir-être et vivre ensemble : en osant affirmer et rechercher des valeurs collectives à la fois classiques (la devise républicaine, dignité, courage, solidarité…) et nouvelles (potentialités de la diversité culturelle à condition de savoir en tirer profit) emportant l’adhésion des comportements individuels (engagements personnels) ».