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40 ANS APRES A VANVES, ANTONIO DOS SANTOS SE SOUVIENT DE LA REVOLUTION DES OEILLETS

Voilà 40 ans, ce 25 Avril 1974, très loin de Vanves à Viseu au Portugal, Antonio Dos Santos se réveillait vers 7H et allumait sa radio comme à l’habitude pour petit déjeuner et se préparer pour rejoindre le collège de cette ville natale où toute sa famille vit encore. Il était responsable des activités socio-culturelles et enseignait dans ce collège qui accueillait un internat. « En me rasant,  j’entends des choses pas normales, de la musique, des marches militaires, parfois entrecoupées de chansons plus populaires. Et je suis resté figé, surtout lorsque furent diffusés des communiqués provenant du Mouvement des Forces Armées (MFA) qui avaient pris possession des radios et de la TV. Il disait « nous avons pris le pouvoir. Nous sommes dans la rue. Restez chez vous ! Ne craigniez rien ! C’est pour le bien du peuple ! Nous maîtrisons la situation ». C’est là que j’ai compris ce qui se passait, même si nous nous attendions à quelque chose, ayant participé quelques temps auparavant à des réunions « secrètes » entre jeunes », car elles étaient interdites,  toutes les associations de jeunes, d’étudiants, d’universitaires ayant été dissoutes. Il y avait une certaine fébrilité que l’on regarde aujourd’hui avec tendresse » raconte Antonio Dos Santos, ex-ête de liste PS, qui se souvient très bien de cette journée du 25 Avril 1974 entrée dans l’histoire du Portugal sous le nom de la Révolution des Oeillets     

« Elle avait commencé quelques heures auparavant, le 24 Avril à 22H55, avec un premier signal envoyé à travers les ondes radio qui diffusérent la chanson « E depois do Adeus » (et après les adieux), écrit par un chanteur très populaire Paulo de Carvalho. C'était le signal choisi par le MFA pour indiquer à tous le début des opérations : « c’est aujourd’hui, préparez vous à partir ! ». Mais le signal définitif a été donné par la radio catholique « Renaissance » en diffusant à 0H20 les premiéres strophes de  « Grândola, Vila Morena » de Joé Afonso qui est devenu le chant mythique de la révoluton des œillets et qui était alors interdite. Grandola est une ville du sud-est du Portugal, et à cette époque une zone agricole aride où l’on cultivait essentiellement des céréalaes, des cultures nourricières pour l’élevage, et notamment de porcs. Terre de grands propriétaires où les ouvriers agricoles trimainent du matin au soir, pour des salaires de miséres, pour les enrichir. Ce signal confirme que les opérations sont en marche de manière irréversible dans tout le pays. Les troupes se dirigent vers leurs objectifs. Par la suite, deux poèmes de Carlos Albino (journaliste au República) ont été lus à la radio » raconte il.

Seize heures plus tard le régime dictatorial s’effondrait sans une goutte de sang versée, à une exception prés : « La gloire qu’en tirent les militaires qui ont pris le pouvoir, est d’avoir essayé de protéger la population. Tous les communiqués radios en annonçant la révolution, invitaient les citoyens à rester chez eux, et conjuraient les forces restées proche du pouvoir, notamment de police, les paramilitaires de la gendarmerie, à ne pas offrir de résistance pour épargner des civils, considérant qu’ils avaient le pouvoir, mais qu’ils n’hésiteraient pas à tirer pour se défendre et défendre le mouvement qu’ils avaient engagés. Et les militaires n’ont tués personnes, même s’il y a eu un mouvement de résistance dans la fin de la journée du 25 Avril, la police secrète, la PIDE (Police Internationale de Défense de l’Etat) ayant tiré et tué 4 civils. Mais ce n’est pas la Révolution qui a tué ! » constate t-il en donnant les raisons du nom donné à cette révolution : « Le point de rencontre des militaires débarquant sur Lisbonne pour prendre le pouvoir, était le marché aux fleurs.  Et c’était la saison des Œillets, fleur saisonnière, de couleur rouge. Et les militaires les ont mis à la boutonnière, et au bout des fusils, et chaque soldat avait le sien ! »!

Toute cette journée du 25 Avril s’est déroulée normalement à Visue presque comme si de rien n’était : «  J’ai rejoint les élèves très tôt puisque nous étions en internat, pour démarrer la journée normalement sans commentaires, même si nous en avons eu plutôt entre enseignants et personnel de services. Il y avait une grande prudence dans les propos même si on sentait une respiration, parce qu’on ne savait pas trop comment cela allait tourner puisque la situation, ce jour là, n’était pas entièrement maîtrisé. Une partie de la Marine avait avancée sur le Tage face au Palais du Gouvernement, prêt à tirer sur le MFA.  Comme si chacun ne voulait pas se découvrir complétement. Car il ne faut pas oublier que nous vivions dans un régime dictatorial où la méfiance régnait, avec une absence totale de liberté d’expression. Avec les enseignants de ma génération, même un peu plus âgé, on se regardait et on manifestait notre satisfaction par de petits signes ou des airs entendus. On était de plus en plus léger au fur et à mesure que la journée avançait. Les jeunes internes ne comprenaient pas ce qui se passait, on essayait de ne pas trop les mouiller là-dessus, en leur faisant mener une journée normale d’une communauté scolaire »

Ainsi, 40 ans après, le souvenir de cette journée est intact : « Nous avons un grand héritage qui est la démocratie, la liberté de pouvoir s’exprimer, manifester, ce qui n’était pas le cas à l’époque. Dans les semaines qui ont suivis la Révolution, on a vu éclore des journaux, des radios, des manifestations spontanées, ce qui a créé quelque peu la pagaille, l’incertitude pendant quelques mois, même si presque deux ans après, le 25 Novembre 1975, une contre-révolution a failli tout remettre en cause. Mais elle a échouée et s’est conclut par un consensus des partis avec un début de recul des militaires, un PC (Parti communiste) très présent qui a accepté le retour des anciens politiques  aux affaires pour rétablir l’équilibre politique. Si nous avons eu la liberté, l’abondance n’est pas venue tout de suite, 4 à 5 ans après, avec un bond en avant à la fois dans l’école, la santé, le pouvoir d‘achat » constate t-il en gardant le souvenir d’une quasi fusion entre l’armée et son peuple à cette époque : « L’armée n’a plus supporté ce régime dictatorial, cet enlisement dans les guerres de colonie et a précipité les choses en étant très claire sur ses intentions, redonner aux autorités civiles le pouvoir. L’armée s’est beaucoup investie auprès du peuple qui a permis cette fusion pendant la Révolution, en rendant des services incroyables : Elle a amenée des médecins de ville dans des territoires reculées de notre pays, où elle a distribuée des vivres,  développée l’éducation…. Une véritable fusion peuple-armée assez extraordinaire s’est produite,  comme on en voit rarement. Et un souvenir extraordinaire pour ceux qui l’ont vécu pendant les deux ans qui ont suivi ». C’est pourquoi ces capitaines d’Avril sont entrés dans la légende avec cette révolution des œillets.

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