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A VANVES « CEUX DU 13 » CELEBRENT LEURS 80 « BERGES »

 

A l’occasion des 80 ans de la cité et dans le cadre des journées du patrimoine de ce week-end, deux journées d’animation seront ouvertes au public (de 11H à 23H le amedi, de 14H à 18H Dimanche).  Le public pourra visiter une exposition retraçant l’histoire de la cité à travers des documents et des photographies de 1929 à 2009 sur l’environnement du quartier, l’intérieur de la cité, ainsi que des œuvres des peintres actuels et passés, en présence de René Sedes, historien et habitant de la cité, qui présentera une nouvelle édition de son livre « square Payret-Dortail, la singulière aventure sociale d’une cité HLM à Vanves » paru aux Editions du Bout de Rue qui sont vanveénnes.

Au programme : L’ouverture des ateliers d’artistes, sur scène différents groupes de musiciens, dont « Sweet Swing » les danseurs de « Attitudes », la projection d’un documentaire réalisé par Jean-Luc Robert qui reprend l’histoire de la cité,  des stands de débit de boisson et de spécialités culinaires.

 

Interview de René Sedes

 

« LE 13, UNE VERSION

 

VANVEENNE DE LA RUCHE » 

 

Vanves Au Quotidien – Pourquoi avez-vous écris ce livre en 1994 sur « Ceux du 13 »

René Sedes : « J’avais voulu écrire ce livre lorsque je suis arrivé à la retraite car je me suis beaucoup plus intéressé à Vanves, et qu’il fallait absolument recueillir les témoignages des premiers résidents qui disparaissaient petit à petit. Le déclic a été provoqué par une opération porte ouverte (des artistes) lorsque l’un des résidents m’a suggéré d’écrire un livre sur l’histoire de la cité. J’avais la chance d’avoir encore des témoins parmi les premiers résidents,  faute d’avoir des renseignements par les archives, parce que ceux de l’Office Public d’HLM du Département de la Seine, ont été perdus je ne sais où.  De surcroît, je m’intéressais à une histoire du logement social, depuis l’origine jusqu’à nos jours avec les dérives des années 60/70, ces grands ensembles qui représentent une véritable bombe à retardement comme la cité des 4000, construits au bénéfice des promoteurs, des architectes, peut être de communes, mais pas forcément à ceux qui y ont résidé. Pascal disait « les hommes, c’est comme les pommes, quand on les entasse, ils pourrissent »

 

VAQ- Et pourquoi l’exemple du 13 rue de Châtillon ?

R.S. : « Parce que c’était une sorte de maquette qui n’était pas destinée, dans l’esprit d’Henri Sellier et de Payret Dortail, l’architecte, à perdurer, mais une expérience de petite citée fermée, assez carcérale, de faible dimension. Ils avaient choisi comme parti de pris de mettre dans cette cité des ateliers d’artistes, au nombre de 27,  qui est l’une des originalités, avec trois modèles : le petit de 25 m2, le grand qui disposait d’une verrière, et l’atelier logement. Ce qui a engendré la prise en main, grâce à l’un des artistes, monsieur Carré, de la vie collective de cette cité par ses habitants.

Ils ont créé un cinéma, les résidents faisant les ouvreuses, les machinistes, ils ont montés deux troupes théâtrale, l’une d’enfants et l’autre d’adultes, encadrées par des comédiens de la Comédie Française et du théâtre Hebertot qui se sont produites dans toute la banlieue. Cela a été l’âge d’or de la cité entre 1930 et 1939, la guerre ayant provoqué une véritable coupure, avec les prisonniers, les gens envoyés au STO, l’arrivée d’une nouvelle population, considérée comme étrangère, qui était victime des bombardements alliés sur les usines Renault, et que les anciens résidents dénommés la « racaille ». Et pourtant c’étaient des gens bien de chez nous, même s’ils considéraient que c’étaient des communistes, car tous ceux qui venaient de Renault, en étaient, parait il.

La cité a même connu des scénes cocasses pendant la guerre : Les caves des différents immeubles avaient été reliés pour former surtout des abris souterrains, constituant un véritable réseau avec différents accès, qui servait d’échappatoire lorsque les gendarmes venaient chercher quelqu’un. Enfin, c’est une cité qui est resté calme à travers toutes ces années, à part quelques phénomènes de bandes et de drogue assez vite réglés, qui tient à la permanence de l’occupation. Les résidents se connaissent, sont là de pére en fils. Et la mixité sociale aux niveaux ethniques,  sociaux-professionnels et générationnels, a énormément joué, avec beaucoup de solidarité de paliers par immeuble

 

VAQ -  Cette cité n’a-t-elle pas été un exemple en matière de recyclage, préoccupation très actuelle  ?

R .S. : « Du point de vue technique, cette cité possédait quelques innovations : des séchoirs, un système de vide-ordure dénommé « garcher » actionné par un piston qui permettaient aux ordures de descendre par gravitation dans un récepteur où elles étaient brûlés. Le chauffage central était doublé par un chauffage dite à cheminée prussienne ( 2 par appartements recouverte de céramique) qui a fonctionné, heureusement, pendant la guerre, alors que le premier avait été arrêté. La salle de bains disposait d’une baignoire avec ballon accumulateur d’eau chaude… Le sol des piéces était constitué de béton d’argile facile à entretenir, les portes intérieurs étaient surmontés d’une vitre cathédrale etc…

On sentait une obsession de l’aération et de la lumière, à un point tel qu’il n’y avait pas de portes dans les immeubles, simplement une ouverture, de même sur les paliers, créant un courant d’air permanent, ce qui provoquait des congéres, lorsqu’il neigeait.  Mais pour des gens qui venaient du bas de vanves, et devait aller chercher l’eau au puit et allait faire leurs besoins dans les dinettes au fond du jardin, c’était extraordinaire ! Ils tournaient en rond et se disaient « mais qu’est-ce que c’est ce confort ! ».

 

VAQ -  Qu’est-ce que vous racontez de nouveau dans cette édition de 2009 ?

R .S. : «  Je raconte les réhabilitations réalisées dans cette cité, sachant que de 1929 à 1970, il n’y a eu aucuns travaux à l’exception d’un ravalement. Les grands travaux ont été menées au début des années 90 avec la suppression du système « garcher », des accumulateurs d’eau chaude, avec la baignoire sabot, la réfection des pièces vides, de l’électricité, de l’alimentation en gaz et en eau, avec un ravalement et des réfections de maçonnerie. Sans toucher au gros œuvre, c'est-à-dire que l’aspect général de cette cité est le même qu’en 1929, sans fissure car réalisé avec des parpaings de machefers qui n’isolent pas beaucoup du bruit, mais assez bien au niveau thermique. Les portes intérieures en chênes massifs ont été conservées. On a ajouté des portes de sécurité métallique, un système interphone pour les entrées d’immeubles.

Puis le dernier ravalement a suscité une bataille car il était prévu de peindre en jaune paille à la stupéfaction des résidents. Or, les couleurs choisies par Payret-Dortail  étaient un camalleu d’ocre jaune, rouge, de carmen, de blanc et de gris. Même les cheminées, peintes en blanc, un peu en forme de palmier, faisaient partie du décor. Les artistes ont réagi, rencontré le maire pour garder la couleur initiale et ont obtenu gain de cause.

 

VAQ – Et puis, il y a les artistes sur lesquels vous insistez beaucoup !

R.S. : « Des artistes comme un canadien abstrait, Yan Oppel, qui a laissé sa plus grand œuvre à l’Opéra Bastille, Brachet qui a occupé 3 ateliers d’artistes successifs,  et surtout a révolutionné la tapisserie en travaillant directement sur le métier, Corsi qui se situe entre l’expressionnisme et le naif, Serge Charhoun, peintre musicaliste qui voulait trouver une grammaire dans la peinture comme une grammaire dans la musique, Jean Claude Bertrand qui était entre le figuratif et l’abstrait… sans oublier monsieur Carré qui était illustrateur assez connu avant guerre. De nouveaux artistes reprennent le flambeau aujourd’hui.

Et pour moi, c’est une version vanvéenne de la Ruche, parce qu’il y a une pépinière de gens dont beaucoup sont à l’initiative de cette fête des 80 ans ce week-end, Helen Roupp, Olivier Hartmann, Michel Lasserre etc...  Il est intéressant de noter que cette prise en main par les résidents s’est faîte en pleine crise économique, 2009 et 1929. Et les artistes d’aujourd’hui paient une dette pour ceux qui ont eu un atelier autrefois lors de la crise économique de 1929. Ils se disent : « Il faut redonner un sens à la vie de cette cité ».

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